2018 : Table rase du passé
La refonte de Burberry en 2018 a été l’une des évolutions les plus notoires de l’industrie de la mode (et des logos), en partie parce qu’elle a été conçue par Peter Saville mais également parce qu’elle a été l’une des premières grandes maisons à adopter la tendance des logotypes sans empattement qui a ensuite envahi l’univers du luxe, de très nombreux logos s’éloignant de leurs versions patrimoniales.
Dans les interviews, Saville a expliqué qu’il avait été chargé de créer un logo qui pourrait fonctionner sur une variété de supports, des étiquettes de vêtements aux sacs à main et même aux bâtiments de la marque. Cette approche utilitariste est devenue courante dans la conception de logos pour les grandes marques, cherchant à créer une identité visuelle cohérente et facilement reconnaissable à travers une grande variété de produits.
Cette démarche avait été impulsée par l’ancien directeur de la création de la marque, Riccardo Tisci. Celui-ci exprimait ainsi que la marque avait besoin d’un logo qui puisse fonctionner sur l’ensemble des assets de la marque. Et c’est ainsi que cet état de quasi-homogénéisation est devenu omniprésente. Cependant, cette approche a également été critiquée pour son manque de créativité et d’originalité, et certains designers avaient plaidé en faveur d’une plus grande diversité dans la conception de logos et d’identités visuelles pour les marques.
À peine quatre ans et demi plus tard, Burberry change à nouveau radicalement pour marquer le début du mandat de Daniel Lee en tant que directeur de la création – remplaçant de Riccardo Tisci, qui avait été le fer de lance de la précédente refonte. L’imagerie révèle deux grandes évolutions de l’ère Lee. La première est un logo actualisé, qui réintroduit le chevalier équestre comme carte de visite officielle de Burberry. Même si on peut saluer un retour à une identité avec une véritable personnalité, l’exécution du logo paraît un peu grossière, surtout lorsqu’on le voit en plus petit, avec des traits inégaux – peut-être l’irrégularité du lettrage est-elle volontaire pour établir une distance certaine avec le précédent logo sans empattement… trop rigide.
2023 : le monogramme est mort ! Vive le chevalier !
La seconde évolution Ce chevalier équestre « Prorsum » de la marque (introduit pour la première fois en 1901) avait été abandonné en 2018 par Riccardo Tisci, qui l’avait remplacé par un monogramme « TB », en référence au fondateur Thomas Burberry… Revient au galop et maintenant en bleu royal, rien que ça ! Il porte un drapeau sur lequel est inscrit « Prorsum » (qui signifie « avant » en latin… qui était une signature de Burberry tout au long des années 2000 et au début des années 2010, notamment sous Christopher Bailey. En honorant les racines de la maison patrimoniale, il semble que Daniel Lee lui redonne ses lettres de noblesse. Cette icône qui avait été quasiment effacée de la bibliothèque d’actifs lors de la refonte de 2018 est sans aucun doute le changement le plus radical, terrassant le monogramme de Peter Saville et piétinant ses diverses expressions décoratives, qui frisaient le papier peint.
Le fait que Lee et le nouveau PDG de Burberry, Jonathan Akeroyd, aient décidé de réintroduire non seulement un logo à empattement (bien qu’il soit minimal), mais également le logo du chevalier – est une décision claire de rompre avec la tradition moderne souhaité par leurs prédécesseurs.
Le nouvel étendard
La campagne tournée à Londres, par le photographe britannique Tyrone Lebon met en scène un grand nombre de stars locales, dont Vanessa Redgrave, Raheem Sterling ou bien encore Lennon Gallagher. Une campagne omniprésente sur les réseaux sociaux et sur le site de Burberry (https://fr.burberry.com/) – l’intégralité des précédentes publications ayant été supprimées. L’ère de Riccardo Tisci et Peter Saville, jetée aux oubliettes. Bannis !
Pour le moment, peu d’applications visibles du déploiement de cette nouvelle identité – donc difficile de juger du système. Qui se cache derrière cette refonte ? La réponse sans doute dans quelques jours… Mais quoi qu’il en soit, Burberry est sans doute le fer de lance d’une nouvelle direction que d’autres maisons pourraient suivre, laissant leur design fonctionnel et désincarné
sur le bord de la route pour reprendre le chemin de designs plus influencés par l’histoire, par leur histoire.
Photographies : @burberry